Cinéma – Francofonia, le Louvre sous l’occupation – Alexandre Sokourov

Superbe moment de cinéma offert par l’irréductible esprit russe. Une réflexion sur l’art, sur l’esprit européen, sur les arts multiples de la résistance et sur le nécessaire combat pour préserver le beau partout et toujours; En pleine crise isisienne, ce film rappelle avec infiniment plus de grâce que la superproduction hollywoodienne que sauver les œuvres d’art de la chienlit nazie fut souvent le fait de quelques serviteurs de l’Etat persuadés de la supériorité des œuvres sur la barbarie des temps.

Sokourov nous perd dans une Histoire où se mêlent sa propre voix, les inquiétudes du temps, la reconstitution de l’occupation dans un Louvre contemporain. On suit une Marianne extatique et un Napoléon pusillanime dans leurs divagations sur le rôle du Louvre. Palais royal, devenu palais de l’édification culturel des peuples, gardien des œuvres pillés par l’Empereur et ses successeurs et enfin écrin de la beauté diverse et universelle. On écoute les conversations entre Jaujard, directeur du Louvre, zélé serviteur de l’art et de Wolff-Metternich, militaire, nazi mais surtout amateur d’art et de culture, décidé à soutenir les efforts du haut fonctionnaire français pour préserver le Louvre des appétits des barbares du Reich.

Le réalisateur russe nous offre avec ce film une ode à la culture, à son universalisme, à la nécessaire préservation du beau partout et toujours. Il y a une sorte d’exhortation à nous rendre compte de la beauté de cet héritage culturel où le visage est offert au regard du spectateur. Une parabole de notre humanité, reconnaître le même dans l’autre, nous souvenir de nos ancêtres en regardant dans les yeux ceux que le Temps a dévoré.

Une fable magnifique, un élan du cœur et une ode passionnée. Un film à ne pas rater.

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Cinéma – Les anarchistes – Elie Wajeman

Au tournant du XIXè siècle, l’Etat français s’inquiète de l’influence politique des anarchistes et des risques pour le contrôle social. Afin de connaître le nouvel ennemi de la bourgeoisie au pouvoir, la police cherche à infiltrer les groupuscules anarchistes qui essaiment dans la capitale. Un jeune gardien de la paix accepte la mission. Sa rencontre avec l’espoir du genre humain va se révéler plus abrupt et complexe que prévu.

Un scénario sans grande originalité sur un sujet qui demandait plus de grandeur et de courage, c’est malheureusement la seule chose qu’on peut retenir de ce film. On est loin de la formidable chanson de Leo Ferré, on se demande même si l’idée d’Elie Wajeman n’est pas de caricaturer à l’extrême le mouvement anarchiste. Cela tient peut être au choix des acteurs, Tahar Rahim et Adele Exarchopoulos que je trouve décidément de moins en moins crédibles pour quelques rôles que ce soit. Cela tient surtout à ces personnages grotesques, sans profondeur et sans intérêt qui sont supposés incarner la fine fleur de l’anarchie.

Certes il y a un travail méthodique et soigné sur les décors, les costumes et la lumière, mais que tout cela est laborieux et sans esprit. Un tel sujet demandait de la nuance, de la force, de l’élégance et de l’engagement, surtout de l’engagement. Il ne ressort qu’une mièvre historiette de gamins à moitié débiles, pris entre leurs idéaux de comptoirs et leurs cervelles malades de l’abus de fée verte. On nous parle d’amour et de corps, mais diable que ces corps à corps sont pénibles et lourds, Adèle ouvrant et fermant la bouche comme un poisson à l’agonie sous les caresses peu sensuelles d’un Tahar Rahim aussi expressif qu’un poisson mort. Les incarnations sont sans grâce et tout cela ennuie fermement.

Bref, pour une petite virée chez les anars, mieux vaut écouter Leo Ferré, au moins c’est incarné.

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Dans la presse….

Intéressantes lectures dans trois revues riches de leur diversité;

53Robespierre se paie la Revue des Deux Mondes. Des portraits multiples d’une figure marquante et divergente de notre Histoire contemporaine. Démon ou héros, pourfendeur de l’ancien monde ou grand massacreur de l’idéal démocratique, difficile de se prononcer. Sans doute parce que, et c’est le premier enseignement de ces portraits à entrées multiples, la réalité est nuancée et loin des caricatures des pros et des antis. Ainsi le portrait le plus intéressant est celui de l’historien Thomas Branthome, qui s’appuie sur la chronologie et réussit l’exploit de sortir enfin l’homme d’Arras de sa gangue de Terreur… On regrettera, en tous cas moi, la présence d’Onfray et de Mélanchon qui jouent à merveille leur personnage et son donc ennuyeux comme la pluie d’automne.

Dans ce numéro de la revue, une belle interview d’Umberto Eco, toujours vif et léger, un être assez rare dans ces périodes d’intense sérieusité, maladie mortelle s’il en est.

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96-300x407Autre monde des Lettres avec Transfuge, toujours riche et éclectique. Un Adonis en guerre contre l’Islam malade de sa peste bigote, Nick Toshes et son art trash du roman de l’Amérique hors les murs, une chronique virulente de l’archi trendy Virginie Despentes et le cinéma avec des chroniques de l’exellentissime « Francofonia » ou très réussi « Madame Bovary ».

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12196287_10153755891721018_345838759417221120_nEnfin le hors série de Books qui nous donne à lire le marronnier de l’année philo avec l’éternelle question du rôle des philosophes. L’avantage c’est qu’on se promène un peu partout pour un tour de la question international, mais il reste souvent une impression de caricature avec du tout ou rien. Le manque de nuances dans les analyses est souvent assez consternant. Par ailleurs, les philosophes rassemblés ici sont les adorés du paysage médiatique, cela manque un peu de nouveautés et surtout de diversités. Bref, du pas mal, mais on tombe trop souvent dans la facilité, Dommage pour une revue qui sait pourtant ouvrir ses fenêtres sur les mondes….

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