Cinéma – Hippocrate

Film enthousiasmant de Thomas Lilti, réalisateur du très réussi Télé Gaucho. Le serment d’Hippocrate, cette vieille lune antique, lorsqu’un médecin pensait d’abord à soigner les corps et les esprits, à prendre soin de son patient, à penser d’abord à ce qui est le mieux pour le malade. Bref, un ennemi dans le monde de l’hôpital occidental moderne, géré par un vendeur de disques, dirigé par des grands pontes coupés de la réalité du monde de la maladie, et remplis de médecins, d’infirmières et d’internes, paumés entre vieilles traditions sexistes, vulgarité de carabin, mépris du malade et désespérance devant l’impossibilité de s’affranchir du rôle de plus en plus évident de simple larbin de la nouvelle entreprise hospitalière. C’est dans cette aventure humaine tragique que le réalisateur embarque son jeune héros, interne frais émoulu de la faculté, fils du grand chef de service, sûr de son savoir technique et découvrant à son corps défendant l’humanité souffrante derrière les cathéters et les appareils respiratoires.

Evidemment, on peut reprocher au film de finir trop bien, les gentils humanistes triomphent de la machine capitaliste et de la logique comptable et inhumaine de la médecine. Mais le portrait reste cruel et si le spectateur finit par faire front commun avec le jeune Benjamin, il n’oublie pas que la majorité du personnel hospitalier, lui-même dépassé par les exigences contradictoires de l’hôpital moderne, est souvent loin, bien loin, des attentes envers ceux qui accompagnent nos pires moments de détresse.

Un film qui sans être un pamphlet dresse un portrait peu flatteur d’un univers que nous sommes tous amenés à rencontrer un jour ou l’autre, et si, ici, le bien et le juste triomphent, on ne doute guère qu’il n’en est pas ainsi au quotidien. Un hommage également à ces médecins venus d’ailleurs pour combler les trous dans nos hôpitaux, traités comme des larbins. Les « faisant office d’Internes » sont les variables d’ajustement d’un monde hospitalier à la dérive.