http://www.magazine-litteraire.com/mensuel/525
Comme le précédent numéro qui présentait les écrivains face à la folie, celui-ci poursuit l’aventure avec la confrontation des hommes et femmes de lettres face à la grande camarde, l’ultime aventure. Mort héroïsée, fantasmée ou rencontre avec l’horreur et l’incompréhensible barbarie, les écrivains ont eu maille à partir depuis toujours avec cette compagne à jamais fidèle. Pendant des siècles, la mort a fait partie intégrante de la vie de chaque homme et femme. Lettrés et paysans, poètes et princes du monde, ils se savaient mortels et ne luttaient pas contre la destinée. Le scientisme du XIX créa le mythe d’une rupture du lien tandis que les horreurs du XXè siècle sanctifiés dans l’holocauste nucléaire initiait l’illusion d’un mort sous contrôle et rejetée désormais loin de la vie. La guerre devenait le seul lieu de la mort et le triomphe des mythes nés à Vienne laissait croire que la mort n’était qu’une illusion aisément bravable par le mot. Mais la faucheuse est joueuse redoutable et alors que l’amour fleurissait sur les charniers des guerres entre les grandes illusions nées d’un humanisme prétentieux la maladie s’invita à la table de tous et de chacun, le SIDA nouveau compagnon de nombre d’écrivains permit au plus téméraires de se mettre en scène dans une agonie des mots égotiques.
Mais ce numéro est aussi celui des mots magnifiques de Pascal Quignard, la mangouste des Lettres françaises et du désespoir de Stephane Zweig et de son épouse chassée d’Europe par les bottes des barbares aryens.
Ce que la littérature sait de la mort? Guère plus que ce qu’elle sait de la vie. Mais dans l’un ou l’autre cas, c’est la littérature rend les deux supportables.